Le bilan est lourd : un mort, quatre blessés graves et
une dizaine plus légèrement touchés. Tous pensent à Marcus Tolédano, le
directeur technique, décédé. Ce lundi 11 novembre, la production de 1789, les amants de la bastille a décidé de
suspendre les représentations jusqu’au 28 novembre inclus. Joint par téléphone,
Rod Janois, co-compositeur de ce spectacle dans lequel il incarne le rôle de Camille Desmoulins, livre ce soir ses impressions.
Quel est l’état d’esprit ce lundi soir?
« Tout le monde est choqué, triste. Ce qui se passe est
injuste. J’espère que ce beau spectacle plein de magie, de rêves et d’espoirs ne
va pas s’arrêter sur un tel drame. Ce n’est pas possible. Si on reste tous sur
cette mauvaise impression, ce sera plus compliqué à gérer psychologiquement. Marcus
est décédé alors qu’il faisait tout pour qu’on soit un maximum en sécurité. Il s’agissait
à la base de renforcer des tables pour une scène qui devait se jouer quelques
heures après. Par respect pour lui, il faut remonter sur scène. Je le connaissais
depuis quatre ans. Il travaillait avec la production depuis huit ans. Il laisse
un petit garçon de cinq ans et une veuve. Les quatre autres blessés sont presque
tous sortis de l’hôpital. »
Vous allez donc tous bientôt remonter sur scène?
« Tout le monde le souhaite mais personnes ne connaît
la date. Les dégâts au Palais des Sports sont très importants. Beaucoup de
costumes et de perruques ont été balayés par l’explosion. Sans parler du
matériel informatique, de sonorisation, et tout ce qui se trouvait là. Pour le
moment, avec la remise à niveau des lieux et les enquêtes engagées, les représentations
sont suspendues jusqu’au 28 novembre inclus. Au-delà, ce spectacle fait vivre
300 personnes. C’est aussi une des raisons pour lesquelles il faut repartir. »
« Personne n’est en danger !
En cas de reprise, y aura-t-il des modifications?
« Si on reprend, il n’y aura plus de pyrotechnie sur
scène. Il ne faut pas croire que le spectacle est dangereux. C’est très
important à dire. Nous avons joué ce spectacle plus de 300 fois sans aucun
problème. Les contrôles de sécurité sont quotidiens et les qualifications des
personnes qui interviennent sont très strictes. L’accident ne s’est pas produit
sur scène mais pendant une banale opération de maintenance. Ce choix de
supprimer les scènes pyrotechniques doit seulement rassurer les personnes qui s’inquiètent.
Personne n’est en danger ! »
Touché à une oreille, comment de portes-tu?
« J’ai des images, des cris, des visions qui me
reviennent. J’étais vraiment au cœur du drame. Je suis bien vivant et je me
rends compte que j’ai vraiment de la chance. J’ai été protégé par les caisses
dans lesquelles on range les vêtements. Si je m’étais trouvé à un 1,30 m plus à
droite, je ne sais pas dans quel état je serais aujourd’hui. Je suis un peu
inquiet pour mon oreille parce que ça ne revient pas. Pour l’instant. Les trois diagnostics
qui j’ai eu vont tous dans le même sens. Il semble que ce soit normal dans de
telles circonstances. Le choc m’a balayé sur plusieurs mètres. Je dois encore
faire des examens. Il faut être confiant : Beethoven était sourd, Mozart n’entendait
pas d’une oreille, Van Gogh était plein d’acouphènes. Et puis quand je vois le bilan du
passage du typhon aux Philippines, je minimalise ce qui m’arrive. »
Thierry Même