J’ai 26 ans et je suis artificière ! On peut aussi dire pyrotechnicienne pour la frime, mais plus simplement : je mets en place des feux d’artifices.
Autant dire que la plupart des soirs de fête, je suis au boulot. Y compris à Noël.
Maintenant que je suis grande je suis artificière
Je suis toute neuve dans le métier : j’ai passé le certificat d’artificière il y a trois ans, en même temps que ma dernière année de master.
Pour résumer, je suis passée directement du lycée (bac L, option latin théâtre) aux Beaux-Arts. J’y ai passé un DNAP (équivalent d’une licence) et un DNSEP (équivalent d’un master).
Comme j’utilisais de plus en plus de feu dans mes travaux, j’ai voulu me spécialiser, d’où le certificat.
La formation d’artificière
Pour les artifices, la formation est plus pratique que théorique et se fait en deux temps : d’abord, il y a deux semaines de formation pour pouvoir passer un examen théorique.
Ensuite, il faut attendre un an et avoir fait plusieurs « grands » feux pour que le certificat soit vraiment validé.
De mon côté, j’ai profité des vacances scolaires pour pouvoir faire tout ça. Ce n’est pas de tout repos mais ça me convenait.
Je travaille toujours pour des fêtes, mais pas forcément pour des célébrations « communes » : je peux aussi être amenée à faire un feu pour un mariage, un anniversaire, une fête de village…
Généralement, on peut dire que c’est un job de week-end, mais il n’y a pas vraiment de temps morts pendant l’année ! Plutôt des temps forts : Noël, nouvel an, 14 juillet, etc.
Travailler comme artificière le soir de Noël
Je n’ai pas à me plaindre : même si c’est un travail en plein air (et pour Noël, ben… ça caille), la plupart du temps, on fait ça pour des villes ou des millionnaires excentriques, donc l’accueil est plutôt bon.
Des types comme Gatsby par exemple.
Pour Noël en particulier, voilà un résumé de la journée de l’année dernière.
Préparation dès le matin jusqu’au soir de Noël
Pour cette soirée, c’est toujours un grand feu qui se prépare, donc on est une équipe d’une petite dizaine sur le « champ de tir » (zone où tous les artifices seront installés).
La plupart du temps, je suis la seule femme, mais avec mes quelques années d’expérience, j’ai appris à me faire ma place, et l’ambiance est plutôt bonne.
Il faut dire que le contexte aide : les feux de Noël se font souvent en montagne.
Le 23 décembre, c’est voyage tous ensemble jusqu’à la ville à illuminer, puis sommeil nécessaire.
Et le 24 décembre, on se retrouve dès 8h à flanc de montagne, avec vue sur la vallée : plutôt cool comme « bureau du jour ».
Ensuite, on turbine : « mortiers » à poser (réceptacles des bombes d’artifices), branchements à faire (maintenant, la plupart des feux s’allument électriquement)…
Le but c’est que tout soit prêt à une heure fixe, souvent minuit. Je pense que pendant la journée, on est loin de l’ambiance de Noël : on a la tête dans le boulot, efficaces !
Là où l’esprit de Noël nous revient à l’esprit, c’est pendant la pause repas du soir, et bien sûr pendant et juste après le feu en lui-même…
Le repas de Noël dans les assiettes en carton
On a souvent droit à un « vrai » repas de Noël (même si c’est servi dans des assiettes en carton). Le feu n’est pas encore tiré, donc on ne peut pas dire qu’on soit totalement détendus, mais c’est tout de même un moment de pause presque festive.
Quant au feu… bon, j’ai un choisi de faire ce métier-là pour ce moment en particulier. Tous ces artifices qui éclatent dans le ciel, le son, la lumière, même l’odeur (de soufre)… Je pourrais en parler des heures.
C’est moi qui l’ai fait.
Disons qu’on aurait presque le temps de profiter, si on n’était pas aussi dans la vérification des artifices !
« Est-ce que tout s’allume bien au bon moment ? Est-ce qu’il n’y a pas un départ d’incendie ? »
L’après-lancement du feu d’artifice de Noël
Juste après, c’est royal : on peut entendre les applaudissements d’une bonne partie de la vallée.
Ce qu’on a fait prend vraiment sens, on se dit qu’on a participé à la magie de la fête. Dans l’équipe, c’est l’instant des « Joyeux Noël ! ».
Puis vient le moment du nettoyage. Je crois que c’est la partie que j’aime le moins : l’adrénaline est tombée, la fatigue arrive, et c’est un travail physique qui nous attend.
Il faut tout trier, jeter, ou ranger dans un camion, autant dire qu’il y a beaucoup de choses à porter.
Et finalement, un repos bien mérité.
Travailler le soir de Noël et la réaction de la famille
Côté famille, ça va. On s’adapte pour se voir la veille ou le lendemain.
Au premier feu, je crois que mes parents avaient un peu peur pour moi (vu mon état lessivé du lendemain) mais ils ont vite compris que c’était mon truc et m’ont laissée tranquille.
Tant qu’on arrive à se voir à un moment, ce n’est pas grave de manquer le 24 décembre.
Côté frère et soeur, je pense qu’ils sont contents pour moi.
En tout cas ils briefent mes neveux et nièces pour leur expliquer la situation (« tata est pas là parce qu’elle fait un feu d’artifice ! »).
Quant aux amis, ils me connaissent assez bien pour ne plus être étonnés : certes, eux « ne pourraient pas faire ça », mais maintenant, ils me demandent plutôt si mon prochain feu de Noël sera assez proche pour pouvoir être vu depuis leur maison.
En fait, j’ai l’impression que chacun est dans sa bulle, mais que ça se coordonne plutôt bien.
En revanche celui qui bougonne le plus, c’est mon copain qui aimerait bien qu’on ait un moment à deux pendant cette période.
Comment je le vis, de travailler le soir de Noël ?
Pour l’instant, c’est encore assez neuf pour que je ne sois pas lassée de mon Noël particulier.
Après, côté émotions, c’est ambivalent.
D’une part, je trouve ça presque reposant : je me prends facilement la tête, mais là, je n’ai pas à me questionner. Et puis, il n’y a pas quatre petits neveux et nièces à gérer !
D’autre part, quand j’arrive le lendemain et que je vois tous les cadeaux déjà ouverts (sauf les miens bien sûr) j’ai un petit pincement au coeur : je me rends soudain compte de tout ce que j’ai manqué…
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